L’achat d’un immeuble en société est généralement réalisé à travers une Société Civile Immobilière (SCI). Or, il peut être opportun d’opter pour une société commerciale classique (SARL ou SAS) lorsque l’investissement est destiné à réaliser de la location meublée.
A défaut, attention aux conséquences fiscales (V. notamment Location meublée et TVA).
SOMMAIRE :
I. LES LIMITES DE LA LOCATION MEUBLÉE EN SCI
II. LES ATOUTS DE LA LOCATION MEUBLÉE EN SOCIÉTÉ COMMERCIALE
LES INCONVÉNIENTS DE LA LOCATION MEUBLÉE EN SCI
La location meublée est une activité commerciale pour l’administration fiscale
Selon l’administration fiscale, une location est considérée comme meublée lorsque les meubles loués avec le local sont suffisants pour donner à ce dernier un minimum d’habitabilité (BOI-BIC-CHAMP-40-10-20170405 n° 10).
Fiscalement, et sauf option particulière, une SCI est assujettie de plein droit à l‘Impôt sur le revenu (IR). Dans ce cas, l’imposition des résultats de la société est réalisée directement entre les mains des associés. C’est la conséquence de la « transparence fiscale »,
Or, dans l’hypothèse où la SCI exercerait une activité de location meublée, même accessoire, cela pourrait remettre en cause son régime fiscal.
Pour l’administration fiscale, l’activité de location meublée est en effet assimilée à une activité commerciale. Par conséquent, elle est imposée dans la catégorie des Bénéfices Industriels et Commerciaux (BIC) (Articles 35 et 206-2 du CGI).
Ainsi l’activité de location meublée d’une SCI, même occasionnelle ou accessoire, entraîne son passage à l’IS.
De manière exceptionnelle, l’administration fiscale tolère l’imposition de la société à l’IR lorsque le montant HT des recettes de nature commerciale n’excède pas 10 % du montant des recettes totales HT.
De plus, pour éviter des difficultés lors de l’année de franchissement de ce seuil de 10 %, l’administration fiscale admet que la société conserve le bénéfice de l’IR durant l’exercice de dépassement. Il convient cependant que la moyenne des recettes HT de nature commerciale des 3 dernières années n’excède pas 10 % du montant moyen des recettes totales HT réalisées sur la même période (BOI-IS-CHAMP-10-30 n° 320 et 330).
Le passage de la société à l’IS est irréversible.
Les conséquences fiscales sur la SCI et ses associés
L’imposition du bénéfice
Soumise à l’impôt sur les sociétés, le bénéfice de la société sera imposé directement à son niveau au taux de 15 % jusqu’à 38.120 € et 28 % au-delà. Ce dernier taux sera progressivement réduit à un taux de 25 % d’ici 2022.
Les bénéfices de la société à l’IS subiront une double taxation :
- une première fois au niveau de la société au taux de l’IS, et,
- une seconde fois au niveau de l’associé en cas de distribution de dividendes.
Lorsque la société est assujettie à l’IR en revanche, c’est comme si, d’un point de vue fiscal, l’associé était directement propriétaire de l’immeuble. Il est donc imposé sur les résultats de la société, en fonction de sa quote part, et ce, même si aucun dividende n’est distribué.
Enfin, en cas d’assujettissement à l’IS, il ne sera plus possible d’utiliser les déficits de la société. L’associé ne pourra pas dans ce cas imputer le déficit subi par la société dans son imposition personnelle.
L’imposition en cas de cession de l’immeuble
Le passage à l’IS est surtout très désavantageux en cas de cession de l’immeuble. Dans ce cas, les plus-values générées seront soumises non plus l’impôt sur les plus-values immobilières mais au régime des plus-values professionnelles.
Dès lors, la plus-value sera imposée au niveau de la société au taux de l’IS sans possibilité d’exonération liée à la durée de détention.
Surtout, la base imposable de la plus-value professionnelle sera nettement plus importante dans la mesure où elle sera égale à la différence entre le prix de vente du bien et sa valeur comptable nette c’est-à-dire après amortissement.
Ainsi, la cession d’un immeuble appartenant à une société soumis à l’IS s’avère plus fiscalisée.
L’imposition en cas de cession des parts sociales
S’agissant de la fiscalité de la cession des parts de la SCI soumise à l’IS, l’associé cédant sera imposé selon le régime des plus-values sur valeurs mobilières. La plus-value sera ainsi fiscalisée au barème progressif de l’IR (plus prélèvement sociaux), en pouvant toutefois bénéficier de l’abattement suivant :
- 50 % si titres détenus depuis 2 ans et moins de 8 ans
- 65 % si titres détenus depuis plus de 8 ans
L’associé cédant a également la possibilité désormais d’être imposé au taux forfaitaire de 30 % selon le mécanisme dit de la « flat tax ».
Les conséquences en cas de mise à disposition gratuite de tout ou partie de l’immeuble à un associéLa société a un intérêt propre, distinct de celui de ses associés. Ainsi, la mise à disposition gratuite est analysée comme un « acte anormal de gestion » par l’administration fiscale. Cette dernière dispose alors d’un double mécanisme de rattrapage : 1. Au niveau de la société, elle pourra réintégrer dans son résultat fiscal les loyers qui auraient dû être perçus. Les montant réintégrés seront calculés en fonction de la valeur locative de l’immeuble 2. Au niveau de l’associé bénéficiaire, il sera imposé sur le montant du revenu présumé distribué par la SCI, si celle-ci avait perçu un loyer Ainsi, il est conseillé d’éviter toute mise à disposition gratuite d’un logement appartenant à une société à l’IS. Il faut en pratique conclure un contrat de location avec un loyer correspondant ou approchant la valeur locative. |
LES ATOUTS DE LA LOCATION MEUBLE EN SOCIÉTÉ COMMERCIALE
Si l’imposition de la société à l’IR s’avère plus intéressante qu’une taxation à l’IS, il peut être opportun de se tourner vers la SARL dite « de famille ».
Si cela n’est pas possible, l’acquisition de l’immeuble par l’intermédiaire d’une SARL classique ou d’une SAS, soumise à l’IS, pourra également permettre de bénéficier de nombreux avantages.
L’acquisition par une « SARL de famille »
Une SARL dite « de famille » n’est rien d’autre une SARL classique.
Cette appellation regroupe en réalité les SARL pouvant bénéficier du régime dérogatoire d’imposition à l’IR puisque cette société est par principe, de droit, soumise à l’IS.
S’il est possible d’opter à l’IR lors de la constitution d’une SARL classique, cette option n’est que temporaire et d’une durée de 5 ans au maximum. Cependant, dans le cas de la SARL familiale, l’assujettissement à l’IR n’a pas de durée limitée dans le temps.
Ainsi, la SARL de famille peut permettre de bénéficier de la transparence fiscale, de la même manière que la SCI soumise à l’IR.
De même, à la différence de la SCI, la SARL de famille reste assujettie à l’IR même lorsqu’elle tire plus de 10 % de ses revenus HT d’une activité de location meublée.
Il s’agit de son principal atout.
La qualité de SARL de famille suppose cependant le respect de certaines conditions.
Le lien exclusivement familial des associés
En premier lieu, pour être « de famille », la société doit être constituée exclusivement entre :
- parents en ligne directe (enfants, parents, grands-parents…), ou,
- frères et sœurs ou,
- les conjoints et les partenaires liés par un Pacs.
Chacun des associés doit être directement uni aux autres soit par des liens de parenté directe ou collatérale jusqu’au deuxième degré, soit par le mariage soit par le PACS.
Ainsi, constitue une SARL de famille, la société constituée entre :
- un époux ou partenaires de PACS ;
- un père et un ou plusieurs enfants ;
- un père, ses enfants et leurs conjoints ou partenaires de PACS ;
- deux frères ou sœurs et leurs conjoints ou partenaires de PACS ;
- un grand-père et plusieurs petits-enfants, à condition que ceux-ci soient des frères et sœurs ;
- un beau-père et son gendre
- deux époux ou partenaires de PACS et l’enfant du premier lit de l’un des époux ou pacsé
En revanche, n’est pas « de famille » la SARL constituée entre :
- deux frères et le fils de l’un d’eux (sauf lorsque cette situation résulte du décès de l’un des frères) ;
- deux époux leurs enfants respectifs non communs ;
- deux beaux-frères (sauf lorsque cette situation résulte du décès de la sœur) ;
- deux concubins et leurs enfants communs ;
- un grand-père et ses petits-enfants qui sont seulement cousins entre eux.
En cours d’existence, ce statut peut être remis en cause en cas d’entrée d’un nouvel associé ne répondant pas aux critères. La remise en cause peut également résulter d’un divorce ou de rupture du PACS de certains associés.
L’exercice d’une activité exclusivement industrielle ou commerciale
L’activité de la SARL doit être une activité industrielle ou commerciale à l’exclusion de toute autre. En effet, elle ne peut pas exercer, même de manière très accessoire une activité civile de location nue. A défaut, le régime de la SARL familiale ne pourra jouer ou sera remis en cause.
L’autre atout de la SARL familiale est de pouvoir cumuler son régime avec celui de la Location Meublée Non-Professionnelle (LMNP) (Cf Les avantages de la Location Meublée Non-Professionnelle).
La SARL de famille permet également d’augmenter le montant des revenus tirés de la location en fonction du nombre d’associés. Si la SARL de famille est composée de deux associés à 50 %, chacun pourra percevoir au maximum 23.000€. Les recettes de la SARL tirées de la location meublée pourront dès lors aller jusqu’à 46.000 € par an.
Enfin, en cas de cession de parts d’une SARL de famille à prépondérance immobilière, l’associé pourra bénéficier du régime des plus-values immobilières des particuliers permettant d’appliquer un abattement pour durée de détention des parts sociales.
L’acquisition par une société commerciale
La SARL « classique » ou SAS sont soumises de droit à l’IS.
Il peut être opportun dans certaines situations d’acquérir l’immeuble par l’intermédiaire de l’une de ces sociétés lorsque :
- La SCI ne pourrait pas conserver le bénéfice de l’IR et que ;
- La SARL de famille n’est pas possible
La soumission à l’IR peut s’avérer pénalisante pour l’associé qui subit déjà à titre personnel une forte pression fiscale.
Dans le cas d’une SARL ou SAS à l’IS, les revenus sont imposés au niveau de la société. L’associé ne sera fiscalisé qu’en cas de versement effectif de dividendes.
En cas de société à l’IR, l’associé est imposé personnellement sur les revenus de la société alors qu’aucun dividende n’est distribué.
C’est le cas par exemple lorsque les revenus de la société sont calqués sur ses besoins de trésorerie notamment pour rembourser l’emprunt bancaire. Dans cette hypothèse, aucune somme n’est distribuée à l’associé mais ce dernier doit payer de l’impôt.
En outre, en cours de vie sociale, le régime fiscal de l’IS permet d’amortir comptablement le bien immobilier. L’amortissement de l’immobilier, à l’exception du terrain, permet mécaniquement de réduire l’assiette imposable de la société.
NOS CONSEILS EN CAS D’INVESTISSEMENT IMMOBILIER EN SOCIÉTÉ
Il est important de déterminer lors de l’achat d’un bien immobilier en vue de réaliser de la location meublée, la forme sociale et le régime fiscal le plus adapté aux objectifs des associés.
A l’occasion de l’achat d’un bien immobilier en vue de réaliser de la location meublée, faites appel à un avocat en droit immobilier et un avocat en droit des sociétés afin de sécuriser les conséquences de l’opération
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